Vers un modèle économique durable pour les éditeurs de journaux et de magazines : apercu de l'importance des licences | ||
14/02/2014 | Tweeter | |
Les éditeurs belges de journaux et de magazines font face à d’énormes défis. La numérisation galopante demande des investissements permanents malgré un chiffre d’affaires en diminution et la concurrence des acteurs technologiques internationaux qui s’imposent comme des intermédiaires dans la distribution et la consommation du contenu local et qui accaparent une part importante des dépenses publicitaires belges en ligne.
La baisse du chiffre d’affaires des éditeurs est le résultat tant d’une baisse des ventes de contenus aux lecteurs que d’une baisse des ventes d’espaces publicitaires aux annonceurs. Depuis 2008, la vente des journaux, hebdomadaires et mensuels a respectivement diminué de 4%, 15% et 33%. La vente de contenus numériques ne peut, à ce jour, en raison de sa croissance limitée, compenser les pertes des ventes des publications imprimées. Parmi l’ensemble des médias belges, les journaux et les magazines sont ceux qui subissent la plus importante perte de revenus puisque la part relative de ces pertes s’élève pour les journaux à 11% de leurs revenus publicitaires bruts et pour les magazines à 23% de ces revenus.
Le secteur continue à investir dans les publications papier mais doit également financer de nouveaux modèles d’édition numérique. Les journaux et magazines attirent ensemble quotidiennement des millions de lecteurs mais cela ne se traduit pas, pour l’instant, par une augmentation suffisante des ventes. La réutilisation des articles de journaux et de magazines sans autorisation, c’est-à-dire sans licence, est une importante barrière à la mise en place d’un modèle payant durable pour les contenus numériques.
A côté de la vente des publications et des espaces publicitaires, les journaux et les magazines perçoivent également des revenus, bien que limités, issus des licences légales et contractuelles pour l’utilisation de leurs contenus par des tiers. Seulement 1% du chiffre d’affaires total des éditeurs belges de presse écrite provient des licences. Les licences règlent et financent la circulation des contenus et forment un élément essentiel du modèle économique numérique des journaux et des magazines. L’examen d’un échantillon d’articles de journaux belges montre un important volume de réutilisations sans licence. Chaque jour, en moyenne, 6% des articles parus dans les journaux papier et 27% des articles parus sur les sites des journaux sont réutilisés sans licence.
Ces réutilisations prennent la forme de piratage (c’est-à-dire une copie intégrale ou partielle des articles), de parasitisme (c’est-à-dire une réécriture des articles sans apport personnel), ou d’agrégation de liens sans respect des règles du deeplinking. Les sites pirates, parasites et les agrégateurs commercialisent des contenus réutilisés sans licence en vendant de l’espace publicitaire autour de ces contenus sans en avoir supporté les coûts de production. La réutilisation de contenus sans autorisation provoque une perte annuelle de revenus des licences de 27 millions d’euros pour le piratage et 7 millions d’euros pour le parasitisme. A cela s’ajoutent des pertes de revenus publicitaires : les sites des journaux et des magazines perdent des visiteurs parce que leurs contenus peuvent également être consultés sur d’autres sites dans une forme piratée, parasitée ou agrégée.
Les utilisateurs sont de plus en plus conscients du fait que le piratage est interdit et se tournent vers le parasitisme. On pourrait illustrer le parasitisme par le fait de modifier uniquement, dans le « nouvel » article, les constructions de phrase de l’article de journal ou de magazine original, sans y ajouter un apport créatif personnel. Le parasitisme ne constitue pas seulement une atteinte à la loi sur le droit d’auteur mais contrevient également à la loi sur les pratiques du commerce.
Une bonne réglementation et un cadre juridique strict sont cruciaux pour la mise en place d’un modèle économique durable pour le secteur de la presse écrite belge. Une étape importante serait la restauration d’une concurrence loyale entre tous les médias. Comme c’est le cas pour le secteur audiovisuel, un droit voisin et une présomption de cession devraient être reconnus aux éditeurs de presse écrite afin de permettre l’exploitation des contenus tant en version papier que numérique et de lutter plus efficacement contre les réutilisations sans licence. Ensuite, les litiges relatifs aux droits intellectuels dans leur ensemble devraient être traités par des juges disposant de l’expertise nécessaire et le tribunal de commerce devrait être le seul compétent en la matière. Enfin, il est nécessaire de clarifier les compétences des agents assermentés pour la recherche et la constatation des réutilisations de contenus sans autorisation et d’introduire des procédures plus rapides et moins coûteuses permettant d’obtenir la cessation d’une réutilisation sans autorisation.
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